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Cinema 8

Publié le par Buster Casey

 Quantum Of Solace de Marc Foster

 45 balais que James Bond existe. Il en bouté des russes, des français, des chinois, des américains latins et autres basanés avides de contrôler le monde par des moyens tous plus délirants les uns que les autres. Il en a essuyé des fusillades, des beignes, des pièges machiavéliques, des explosions et tout ça sur terre, sur mers et dans l'espace. Et puis, il en a profité aussi parce que, question bagatelles, James, il est pas manchot non plus. Et toujours aussi fringant avec ça ! Bref, ça fait 45 ans que ça dure... et ça a fini par se voir !

 Le renouvellement d'une franchise est toujours difficile. Le fan est présent comme il peut être chiant et chaque changement doit se faire dans la continuité. Au fur et à mesure des années, 007 a suivi les modes (blaxploitation, S-F, gadgets délirants...) au point de se remettre mollement en question durant la période Brosnan. Chaque nouvel acteur apportait une touche particulière au rôle, avec plus ou moins de succès. Au charme animal de Sean Connery a succédé le flegme so british de Roger Moore (le seul acteur doublé même quand il donne un coup de poing !), le pas dedans Timothy Dalton (énorme acteur au demeurant) et un Pierce Brosnan qui a opéré un retour aux origines. Ayons aussi une pensée émue pour Georges Lazenby qui a tenu le rôle une seule fois dans un épisode honni par les fans (mais loin d'être aussi mauvais, je vous l'ai dit, c'est con un fan des fois...).

 Comme je l'ai commencé plus haut, Brosnan avait tenté de remettre un Bond des origines sur les rails, plus méchant, plus sexuel, plus je-m'en-foutiste. C'était sans compter sur la frilosité des producteurs antédiluviens qui tenaient à leur poule aux oeufs d'or. Les changements se sont donc faits avec parcimonie au détriment d'un gros pétage de plombs niveau gadgets. Le pompon est atteint avec Demain Ne Meurt Jamais, censé "radicaliser" la franchise mais qui accumule les bourdes et culmine au pic de la nanardise lors de la "fameuse" course-poursuite sur un lac gelé en bagnoles de marque avec mitrailleuse intégrée sur le capot. Après un tel déluge de mauvais goût qui achevait la série d'une balle dans le dos (preuves faites dans l'énorme édition DVD dudit film dont les excellents bonus dévoilent des scénaristes sous Temesta et un Lee Tamahori relégué en réalisateur de deuxième équipe), le mythe se trouvait au pied du mur. Pile au moment où le revival de certains mythes envahissait les écrans et où l'adaptation au cinéma de héros de comics passait par une attitude plus mature (pour les plus réussis). D'où un brainstorming des plus intense pour pondre au final une sorte de 007 begins. Casino Royale était né !

 Et le fan a fait chier dès la racine au choix de Daniel Craig. C'est vrai que par rapport aux belles gueules qui poussaient à la roue pour incarner l'agent le moins secret du monde, Craig arrivait bon dernier. Mature, blond avec une figure taillée au couteau et une bouche tombante en moue boudeuse constante, seuls ses yeux d'un bleu profond jouait pour la note "charme" de son personnage. Or, ce que le fan n'a pas compris, c'est qu'un choix pareil indiquait une vraie volonté de réorientation. Casino Royale donnait pleinement naissance à son héros à travers un nombre de scènes formatrices incroyables jusqu'à un climax terrassant et une dernière image qui envoyait le film dans des contrées que peu prétendent atteindre. L'accouchement était une réussite, qu'en est-il de ses premiers pas ?

 QOS est plus court. Pour ceux qui trouvait le précédent trop longuet, ce n'est malheureusement pas une bonne nouvelle. Certaines intrigues se trouvent ainsi expédiées au petit trot et les ellipses sont un peu brutales. Autant Casino Royale aurait pu être raccourci (encore que...), autant celui-ci aurait mérité d'être rallongé. Cela ne bouscule pas l'histoire, très terre à terre, marquant une volonté de créer une organisation criminelle aux buts réalistes à la différence des projets abracadabrantesques des anciens méchants. Mais ces petits écueils nuisent à la fluidité d'un récit mené à 200 à l'heure.

 Que ce soit dit, QOS laisse place à l'action. Courses poursuites destroy, mano a mano hardcore, voltige, sur terre, sur mer ou dans le ciel, Bond n'a pas le temps de souffler... et le spectateur non plus. Soyez prévenu, le film démarre avec 20 minutes d'action tendu comme un slip et ne se relâchera qu'à la fin, dans un final digne des glorieuses 80's qui faisaient péter un décor entier juste pour le plaisir.

 Craig affirme sa prestance en 007 et continue sa lancée en interprétant un personnage antipathique et sale con mais dont l'humanité et la blessure profonde ressurgissent dans des instants clés. Ce James Bond n'a pas de gadgets, utilise le sexe comme moyen d'avoir la paix (on ne sait même pas s'il en retire du plaisir ou s'il s'en fout) et fait montre de peu d'humanité avec ses semblables (voir comment il tue sans ciller un seul instant). L'acteur excelle à donner corps à un personnage détestable mais touchant, incroyablement salopard mais humain. Il montre par un subtil jeu du visage toute la souffrance et la vengeance qui le rongent malgré ses démentis à M, campée par une Judi Dench définitivement à 110% dans son personnage. La relation qu'elle entretient avec Bond est l'un des points forts et des plus intéressants du film, une sorte de filiation, de respect et de protection l'un envers l'autre. Le reste du casting est aussi fort méritant (Mathieu Amalric est impeccable et la Bond girl sort des clichés habituels à ce rôle) et mention spéciale au montage, notamment lors de parallèle audacieux dans certaines séquences de haute volée.

 On pourra regretter l'absence de la cultissime réplique (hé ben alors ?), d'un générique pas aussi beau qu'il aurait du être, d'une chanson théme mal à propos et d'une certaine épilepsie lors de certaines scènes d'action. Mais cela ne change pas le fait que QOS est un excellent Bond doublé d'un excellent film. Vivement la suite...

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